Elle jouait gros et elle a déçu...
Le débit toujours aussi lent ; évitant le bain de foule, Royal est apparue figée derrière son pupitre à réciter un discours fleuve, bien loin d'un Mitterrand, redoutable orateur et tribun florentin.
Il est impossible de ne pas partager le sentiment des 2 intervenants précédents. Et d'affirmer que ce grand oral d'hier à Villepinte n'a été, au final, qu'une
longue litanie de mesures démagogiques non financées !
Attardons-nous néanmoins un instant sur ses propositions :
(Source : "
Le Parisien - Aujourd'hui en France")
1/ Outre le fait que Royal, copiant en cela le projet socialiste, ne s'engage pas sur l'échéance, le SMIC atteindra ce montant naturellement par le jeu des revalorisations. De plus, l'augmenter pour l'augmenter ne rime strictement à rien si l'on ne réfléchit pas parallèlement aux évolutions de carrière afin que les salariés ne restent pas plafonnés au SMIC toute leur vie !
2/ Preuve du manque cruel d'ambition de ce projet (
la seule vraie solution étant l'instauration d’un niveau de retraite minimum à bien distinguer du minimum vieillesse, attribué sous condition de ressources - Fabius proposait 85% du SMIC ; Bayrou, 90%) mais également du manque de perspectives puisque ni Royal, ni le projet socialiste n'indiquent comment garantir le financement des retraites, préalable nécessaire à toute augmentation !
3/ Mesure, objet du débat de ce jour au journal télévisé de 13 heures de France 2 tant elle apparaît floue...
Laissons donc la parole à Jean-Pierre Davant, président de la Mutualité Française : "
Il faudrait demander des précisions à la candidate car gratuité des soins pour 12 millions d'enfants, cela suppose effectivement une profonde modification du système de santé et de protection sociale obligatoire. [...]
Que faisons-nous pour les dépassements d'honoraires, est-ce que l'on demande aux médecins d'y mettre un terme ?"
4/ La méthode de l'ordre juste appliquée au droit absolu et perpétuel que constitue le droit de propriété !
Rappelons que ce droit est constitutionnellement protégé...
Au lieu de les sanctionner et de les montrer d'un doigt accusateur alors qu'ils doivent souvent faire face à des loyers impayés et des dégradations de leur bien, encourageons et incitons plutôt les propriétaires de logements inoccupés à les remettre sur le marché ! Le résultat sera autrement plus efficace !
5/ "
Un prêt de 10.000 euros ne saurait constituer une réponse appropriée pour les milliers de jeunes qui prendraient d’importants risques d’endettements, qu’ils soient étudiants ou en insertion professionnelle. Cette mesure, mise en place en Grande Bretagne, montre ses limites en créant d’importants arrêts anticipés d’études ou de surendettement."
Brillante démonstration qui n'est pas de mon fait mais de l'UNEF ! Et pourtant, on ne peut pas dire que cette organisation étudiante soit particulièrement à droite, ce serait même plutôt le contraire ! Royal n'a semble t-il pas compris que autonomie pour les jeunes doit aussi rimer avec sécurité et ne pas obérer leur avenir !
6/ Ni plus, ni moins que ce que propose Sarkozy depuis le discours d'Agen !
Rien n'indique comment cela sera financé alors que toute la philosophie de cette mesure réside justement dans ce point crucial : allons-nous vers une taxe sur les licenciements en échange d'une plus grande flexibilité ?
Autant dire qu'à ce titre, la proposition de NDA, pour que chaque français soit doté, dès sa sortie du système scolaire, comme pour la Sécurité Sociale, d’un compte de sécurité professionnelle transmissible d’entreprise en entreprise et pouvant être alimenté, notamment en crédit formation, par l’Etat, les collectivités locales, l’ANPE ou les ASSEDIC, est autrement plus concrète et largement plus efficace car ces droits seraient attachés, non à l'emploi, mais à la personne du salarié, et progresseraient avec lui !
7/ Encore une proposition mal étudiée qui va produire un coût financier conséquent !
Pourquoi ? Il est un fait que cette allocation doit être réformée, comme le système de bourses par ailleurs. Mais une telle réforme doit être qualitative avant d'être quantitative. En ce sens, cette allocation devrait être rendue modulable en fonction de certains critères : l'âge ; le niveau scolaire etc. Il est évident que les besoins matériels et financiers ne sont pas identiques entre un élève en école primaire et un lycéen !
8/ La police de proximité étant morte avec l'arrivée de Sarkozy place Beauvau, Royal propose de la réintroduire sous le vocable "police de quartier".
Nécessaire mais insuffisant. Pourquoi ? Le problème des banlieues ne peut se régler uniquement par de la "présence" dans les quartiers (
Voir mon article sur les "sous-préfets" voulus par Bayrou) mais par une réforme en profondeur des leviers que sont la politique de la ville et du logement, l'école, la justice et naturellement la police.
A ce titre, on ignore totalement le rôle et les missions qui seront assignées à cette police de proximité. S'il s'agit d'installer et/ou renouer le dialogue social dans les banlieues ainsi que permettre de renforcer la lutte contre la petite et moyenne délinquance, bien entendu sa mise en place constituera une bonne chose mais si celle-ci se limite à une simple présence virtuelle destinée à donner un sentiment de sécurité qui n'existe pas dans les faits, cette police ne servira strictement à rien !
9/ Qui n'a pas le souvenir des JET (Jeunes en équipes de travail), qui ont existé pendant 17 ans, jusqu’en 2003 et sa suppression par MAM ? Le dispositif était destiné aux mineurs délinquants comme alternative à la prison et aux majeurs déjà condamnés, sur la base du volontariat. Là aussi, l'encadrement était militaire.
Résultat ? Un échec total que veut réintroduire à tout prix Royal !
Au delà des résistances de l'armée qui ne souhaite pas que lui soit confié une telle mesure d'encadrement, à juste titre car ce n'est pas sa raison d'être, il faut poser ouvertement les questions au centre de cette mesure : 1) va t-elle remettre dans le droit chemin les délinquants récidivistes ? 2) réduira t-elle la délinquance ?
Aux deux questions, je réponds non car ce modèle sanctionnel prôné par Royal n'agit pas sur les causes et les racines de la délinquance mais se contente d'attendre qu'elle se produise pour la réprimer d'une façon qui est inadaptée car elle nie le concept de responsabilisation.
Philippe Chaillou, président de la chambre des mineurs à la cour d'appel de Paris, affirmait le 5 février dernier : "
Bien évidemment, les politiques, c'est la plus noble de leurs missions, doivent avoir, dans la résolution de cette question, un rôle majeur. Mais ils doivent absolument changer de méthode."
Manifestement, Royal n'en a pas l'intention !
10/ "
Quant aux entreprises, je réclame la modulation du taux de l'I.S. de sorte que celles qui créent de l'emploi et investissent soient avantagées." - Nicolas Sarkozy, discours à Saint-Etienne, 9 novembre 2006...
Une nouvelle fois, rien ne sépare le PS de l'UMP !
Certes, l'idée de moduler l'impôt sur les sociétés peut paraître séduisante mais elle n'aura aucune portée concrète si elle ne s'accompagne pas d'une réforme profonde de l'entreprise, telle que nous, gaullistes, la prônons depuis des années en défendant le concept de participation.
Seul ce concept pourra garantir une mobilisation de chaque instant au service de la réussite de l’entreprise, comme de son intégrité face aux OPA hostiles ou aux velléités de délocalisations.
Alors, et seulement à ce moment là, comme le prône NDA, "
l’Impôt sur les Sociétés sera modulé en fonction des résultats de chaque entreprise en matière de participation : celles qui compteront 0% d’actionnaires-salariés subiront une majoration de 20%, celles qui s’approcheront de l’objectif fixé bénéficieront d’une déduction importante."
Bref, il faudra bien plus que ce catalogue mal taillé pour battre Sarkozy... et, plus important, pour relever la France !